Coups de tarets et impasses à la Côte

Dans les années 1730, les mollusques xylophages se sont attaqués aux infrastructures portuaires d’Ostende. Les mesures des autorités ont permis de sauvegarder les digues, mais non les écluses de Slyckens qui se sont effondrées en 1752. Les conflits d’intérêts ont bloqué toute décision avant que le pouvoir central impose des réformes (1720-1770)

   Redoutables pour l’économie maritime, les tarets, ces mollusques bivalves qui s’attaquent aux bois immergés, ont proliféré dans les années 1730 au long des côtes belge et néerlandaise actuelles. Capables en 300 jours de faire perdre à un bloc de pin la moitié de son poids et davantage encore de son volume, les xylophages ont posé aux sociétés un défi d’envergure, relevé bien ou mal selon les cas, ce qui ne fut pas sans retombées politiques dans le comté de Flandre. Une étude de Michael-W. Serruys (Vrije Universiteit Brussel) nous permet aujourd’hui d’en prendre la pleine mesure [1].

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Les œuvres coulées du bronzier bruxellois

Bronzier et orfèvre au service de Charles de Lorraine, Michel Dewez a notamment travaillé à la salle d’audience et au grand salon du palais du gouverneur général, avant de tomber en disgrâce en même temps que son frère l’architecte Laurent. Rares sont ses œuvres à avoir survécu aux troubles révolutionnaires (1773-1789)

   A Bruxelles au cœur du quartier royal, non loin de la place du même nom, s’élève le palais de Charles de Lorraine, témoin, certes transformé au fil du temps, des plus hauts fastes du XVIIIe siècle. De la salle d’audience aménagée par le gouverneur général des Pays-Bas méridionaux, qui ne put toutefois l’achever, l’historien d’art Reinier Baarsen (Université de Leyde,  Rijksmuseum Amsterdam) écrit qu’elle constitue « une sorte d’apothéose des réalisations des artistes et des artisans » de nos régions à l’époque et même « une des pièces les plus prodigieuses créées en Europe à la fin de l’Ancien Régime » ainsi qu’ « une brillante démonstration des fruits d’un gouvernement bienveillant » .

   Comment, pour parvenir à pareille réussite, se sont noués les rapports entre les métiers de la création et leurs clients ou mécènes des élites dirigeantes ? C’est ce que vient éclairer une étude de cas due à Kevin Brown, « chercheur indépendant » vivant en Ecosse, ce qui n’est pas sans lien avec le sujet [1].

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« Amadis » , chevalier modèle et phénomène éditorial

La célèbre romance ibérique a connu pas moins de 66 éditions néerlandaises en 80 ans, la première par l’imprimeur anversois Martin Nuyts en 1548. Mais le récit qui fascina le Don Quichotte de Cervantes eut aussi ses contempteurs. L’humaniste Juan Luis Vives le fit figurer parmi « les livres pestilentiels » (XVIe-XVIIe siècles)

   Faut-il y voir une illustration de cette « première globalisation » que des historiens font survenir à partir de 1500 environ ? Toujours est-il qu’à cette époque, la littérature en provenance du monde ibérique se répand comme traînée de poudre, non seulement dans nos Pays-Bas, alors liés politiquement et commercialement à l’Espagne, mais aussi dans d’autres espaces, français notamment.

   Les imprimeurs et les traducteurs constituent, bien sûr, la principale courroie de transmission culturelle. Et le centre européen par excellence à cet égard n’est autre qu’Anvers. On y touche le sommet avec la diffusion de l’Amadís de Gaula (Amadis de Gaule), célèbre roman de chevalerie dont l’origine demeure discutée. Sa plus ancienne édition/adaptation connue, due à l’écrivain Garci Rodríguez de Montalvo, est datée de 1508, à Saragosse. De cette œuvre, Rita Schlusemann (Institut für Deutsche und Niederländische Philologie, Freie Universität, Berlin) a retracé le parcours remarquable en terres néerlandophones [1].

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