« La littérature est un des plus puissants moyens pour diriger, mener et éduquer le peuple et la nation. Elle est certainement plus efficace que la science, l’école ou les autres domaines de l’éducation » . Ainsi s’est exprimé Zdeněk Nejedlý, considéré comme le principal idéologue du régime communiste tchécoslovaque, au Congrès des écrivains du 6 mars 1949. Est alors imposée, comme on le sait, la norme du « réalisme socialiste » que le même Nejedlý définit non pas comme un reflet de la réalité mais comme l’évocation « par des procédés artistiques de l’idée de la réalité » . Parmi les effets de l’action des dispositifs de propagande de l’Etat, on observe notamment une prolifération de fictions populaires idéologiquement inoffensives, alors que les ouvrages instructifs se raréfient jusqu’à la pénurie.
Les livres étrangers sont eux aussi soumis « au système orwellien à l’œuvre derrière l’octroi des permissions de publication » , selon les termes de Wilken Engelbrecht, docteur de l’Université d’Utrecht, professeur aux Universités d’Olomouc (République tchèque) et de Lublin (Pologne). Il est l’auteur d’un gros plan sur le sort réservé dans ce contexte particulier aux littératures néerlandaise et flamande [1]. Un sort tributaire notamment d’une autre des prédilections du pouvoir marxiste-léniniste: celle qui favorise le roman historique, en ce qu’il permet « de lier le combat présent avec la tradition et le passé révolutionnaires du peuple » , dixit Georgi Dimitrov, le leader bulgare qui a été l’agent principal de Staline au sein de la IIIè Internationale. Ainsi, parmi les 186 titres néerlandophones publiés en traduction tchèque entre 1949 et 1989, 50 (27 %) relèvent du genre cher à Alexandre Dumas père. Cette part diminue toutefois dans les années ’70 et ’80: plus que 9 sur 49 (18 %) pendant la période 1980-1989.
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