Au travail dans une entreprise en déclin

Dernière grande fabrique textile gantoise, UCO Braun a fini par succomber en dépit des rationalisations et d’une pression accrue à la productivité. Les sources écrites et orales y témoignent des réticences syndicales envers le salariat féminin et des relations collégiales, sans plus, entre travailleurs d’origines différentes (1950-2009)

En janvier 2009, les travailleurs d’UCO Braun franchissaient pour l’ultime fois la porte de ce qui avait été la dernière grande fabrique textile gantoise. Ouverte en 1950, sise à la Maïsstraat, elle faisait partie intégrante de l’Union cotonnière, devenue UCO n.v. en 1964. A la suite d’une reconversion dix ans plus tard, son département spécialisé dans la production de jeans avait ajouté le mot « Sportswear » à son nom.

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Vue aérienne d’UCO Braun. (Source: Miat F-2297 et « UCO Maïsstraat. Verwerven verhalen » , p. 4, https://ookmijn.stad.gent/sites/default/files/idea/files/20150511_pu_uco_15_00776_verhalenboekje_uco_syl_lr02.pdf)

La tâche de retracer ces six décennies d’activités s’avère des plus ardues. Comme il arrive bien souvent dans le cas des entreprises, une grande partie des archives a disparu. Sont demeurés néanmoins les dossiers du personnel, sauvés de justesse et conservés aux Archives de l’Etat à Beveren. Des étudiants de l’Université de Gand ont été mis au travail (formateur) sur ce fonds et leurs résultats jugés les plus intéressants ont fait l’objet d’une édition digitale [1]. Ils portent sur la période 1985-2009, pendant laquelle l’usine employa quelque 1570 personnes. Des entretiens avec certaines d’entre elles ont permis aux jeunes chercheurs de compléter leur information. Il y manque toutefois le point de vue patronal.

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La naissance laborieuse des pianos « à la belge »

Leur fabrication chez nous a démarré plutôt petitement et, bien sûr, sous l’influence allemande. Le Tournaisien Henri-Joseph Van Casteel, établi à Bruxelles, a été le premier vrai pionnier. On note une croissance de la demande et du nombre d’entreprises, mais peu ou pas de brevets relatifs à une invention importante (1761-1851)

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La maison L. Hoeberechts & fils a duré presque un siècle, jusqu’en 1910. (Source: Must – Textielmuseum, Renaix; n. 1, cover)

    Pas de chauvinisme: c’est à des Allemands que nous devons l’implantation d’une industrie du piano, comme ce fut aussi le cas en France et en Angleterre. Et à en juger par l’étude que Pascale Vandervellen consacre à cette naissance, les anciens Pays-Bas méridionaux et la principauté de Liège ont démarré plutôt petitement [1]. Alors que les concepteurs du mariage du clavier et des cordes frappées – Cristofori, Marius, Schröter, Silbermann surtout – avaient accompli leur œuvre dès le premier quart du XVIIIè siècle, il faut attendre 1761 pour trouver chez nous la première mention d’un fabricant qui propose « des instruments pianoforte, qui sont des clavecins d’un genre nouveau » . Il s’agit, selon le journal Annonces et avis divers, de Fregfried, établi à Bruxelles mais d’origine allemande. Ses produits, de structure verticale, sont présentés comme plus maniables, plus harmonieux et se désaccordant moins facilement que leurs prédécesseurs à cordes pincées.

   Mais Fregfried ne semble pas s’être éternisé sous nos cieux. Et quelques années s’écoulent encore avant qu’en avril 1767, un article de la Gazette de Liége – simple homonyme de la Gazette actuelle née en 1840 – fasse état de la vente d’un « clavecin appelé pantalon » qui, d’après la description donnée, présente bien les mêmes caractéristiques que celles des pianos de Fregfried. Deux ans plus tard, le premier concert de piano attesté dans les provinces belges est donné par le compositeur liégeois Jean-Noël Hamal sur un instrument que son neveu a ramené de Rome. La digestion de la nouveauté est cette fois bien engagée. La même année 1769 voit s’établir à Bruxelles le Tournaisien Henri-Joseph Van Casteel, qui sera « le premier vrai pionnier » de la fabrication de pianos sous nos cieux. Maîtrisant parfaitement le métier qu’il a appris à Lisbonne, il bénéficie rapidement de la reconnaissance des musiciens bruxellois. Et il fait aussi des émules. Autre indice: à partir des années 1770, les premières partitions spécifiques pour piano sont éditées à Bruxelles.

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